Lorsque nous écoutons le « Concerto pour flûte n°1 en sol majeur » de Mozart, une pièce musicale très gaie et enlevée, nous nous y associons le plus souvent des couleurs chaudes et lumineuses, tendant vers le jaune et l’orange. À l’inverse, lorsque nous écoutons le Requiem en ré mineur du même compositeur, forcément beaucoup plus sombre et plus grave, nous nous y associons des couleurs qui tendent vers le gris-bleu.
C’est le résultat obtenu par des scientifiques de l’Université de Californie (Berkeley, États-Unis), au terme d’une étude menée sur 100 volontaires dont la moitié était des Américains, et l’autre moitié des Mexicains (un choix méthodologique dicté par la volonté de ne pas être influencé par d’éventuels biais culturels).
Plus généralement, le psychologue Stephen E. Palmer et ses collègues ont observé avec cette étude que le cerveau humain a tendance à associer des couleurs jaunes, claires et vives, aux musiques de tonalité majeure, jouées sur un tempo rapide. Tandis que des couleurs sombres, tendant vers le gris et le bleu, sont plutôt associées aux musiques de tonalité mineure, jouées sur un tempo lent.
Pour parvenir à ce résultat, les scientifiques ont fait écouter à leurs volontaires 18 pièces de musique de tonalité majeure et mineure, dotées de tempos différents. Puis il a été demandé aux volontaires de choisir cinq couleurs au sein d’une palette de 37 couleurs. Enfin, les participants ont qualifié les émotions qu’ils avaient ressenties à l’écoute des morceaux de musique, en les positionnant sur plusieurs échelles émotionnelles (de triste à heureux, de calme à violent, etc).
Une méthodologie qui a permis d’aboutir à des résultats étonnamment cohérents, et ce quelle que soit l’origine culturelle des participants. Et pour cause, puisque les chercheurs ont obtenu un taux de corrélation entre les couleurs choisies et les émotions associées aux morceaux de musique correspondants qui avoisinait les 95 %.
Un tel résultat est-il si surprenant que cela ? En réalité, pas tant que cela. Tout d’abord, parce que l’existence d’une corrélation entre les émotions et les couleurs a déjà été mise en évidence par de précédentes expériences. Parmi ces expériences, on peut par exemple citer une étude publiée en 2010 dans la revue « BMC Medical Research Methodology » (consulter l’étude « The Manchester Color Wheel: development of a novel way of identifying color choice and its validation in healthy, anxious and depressed individuals »), qui avait montré que les personnes déprimées en situation de dépression associaient plus fréquemment à leur état émotionnel des couleurs tendant vers le gris, tandis que les personnes en bonne santé avaient plutôt tendance à associer à leur état émotionnel des couleurs chaudes, tendant vers le jaune.
Quant au fait d’associer des morceaux de musique en mode majeur, joués sur un tempo rapide à des émotions positives (gaieté, bonheur…), force est de constater là aussi qu’une telle corrélation n’est pas nouvelle. Parmi les études ayant expérimentalement mis en évidence l’existence de ce lien, il y a par exemple des travaux récents publiés par des psychologues américains de l’Université du Missouri. Cette étude, publiée en décembre 2012, révèle ainsi que l’écoute quotidienne de morceaux de musique écrits par le compositeur américain Aaron Copland, connu pour ses pièces musicales au tempo très rapide, permet plus facilement d’améliorer son humeur (consulter l’étude « Trying to be happier really can work: Two experimental studies »).
Les travaux de Stephen Palmer et de ses collègues ont été publiés le 13 mai 2013 dans la revue américaine Proceedings of the National Academy of Sciences, sous le titre « Music–color associations are mediated by emotion ».
Journal de la Science
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